Compte tenu du fait que le thème annuel du CPL pour 2018 et 2019 était "l'avenir de la police", la section de la Région de Bruxelles-Capitale n’est pas restée inactive et a voulu démontrer son implication. Ainsi, notre section a organisé un après-midi de réflexion[1] fin 2018 sur le thème "L'avenir de la police à Bruxelles". Notre objectif était de formuler des propositions pour un fonctionnement efficace, fort et flexible, en tenant compte de la spécificité de la Région de Bruxelles-Capitale.
Ces considérations sont à mettre en parallèle avec le travail réalisé par le groupe de réflexion du CPL/national ayant comme sujet les « Points d’attention prioritaires afin de tendre vers une excellence dans la fonction de police moderne, bénéficiant d’un large soutien » qui a été développé dans le cadre du nouvel accord de gouvernement 2019-2023. En a découlé, en avril 2019, un plan en 10 points[2] auquel nous souscrivons entièrement.
Compte tenu du résultat de nos réflexions, un groupe de travail du CPL-Bruxelles a ensuite regroupé un certain nombre de points clés qui affinent le plan en 10 points ou y ajoutent certains accents. Le débat sur un agrandissement d’échelle n'a pas été inclus. Par ce mémorandum, nous voulons informer le CA national de nos différents points de vue et de notre vision.
La situation de la région de Bruxelles est unique, complexe et rend délicat le bon fonctionnement des services de police. Bruxelles, capitale du pays et siège des institutions européennes, est confrontée à une importante croissance démographique et à une densité de population élevée. Elle est un important bassin d’activité économique et fait face à une large diversité sociale et culturelle. La mobilité et la protection de l’environnement y constituent un défi. La population met régulièrement l’accent sur un sentiment d'insécurité. La police est constamment confrontée à des exigences de sécurité internationales et technologiques plus élevées et plus complexes. Les forces de police sont également de plus en plus engagées dans l’aspect de la gestion négociée de l'espace public.
1. Connexion au sein de la police bruxelloise
L'attention à accorder au développement d’une nouvelle culture d’entreprise au sein des services de police, ne peut qu'être encouragée. Cette philosophie est le ciment qui unit les membres de la famille policière et est une condition expresse à un fonctionnement policier optimal. La formation et la mise en contact des membres des services de police au sein de programmes qui promeuvent l'excellence dans le fonctionnement des services de police en constituent le catalyseur principal (voir ci-après).
Mettre l’accent sur sa propre région est donc essentiel. L'élaboration d'une vision pour la police de la région de la capitale est une valeur ajoutée, car elle intègre les défis spécifiques, explique et renforce les ambitions communes. La vision respecte l’identité de toutes les entités et relie leurs perspectives d’avenir. Une vision commune forte guide les politiques de nos gouvernements, notre propre gestion et les opérations administratives et judiciaires. Elles forment également une ligne directrice pour tous les employés opérationnels et civils. Le développement d’une ligne directrice claire est, à notre avis, une nécessité. Les éléments suivants peuvent être inclus dans cette vision. La Conférence des Chefs de Corps peut également jouer un rôle important en tant que groupe de réflexion pour le développement de ce processus.
2. Accent sur le personnel et l’organisation
Recruter et fidéliser les collaborateurs est une condition sine qua non afin d’atteindre les objectifs de chaque entité. Il y a donc lieu d’accroître l’investissement et de faire preuve d’inventivité dans les initiatives de sélection et de recrutement. Le mélange de campagnes ciblées, de vastes projets médiatiques, d'interactions directes, d'ateliers, de workshops et d’accélération des procédures semble être une bonne méthode de travail, mais cela est insuffisant pour compenser la pénurie de personnel.
D'une part, la police peut - globalement - faire davantage d'efforts en termes de marketing : en faisant appel à la diversité et à la multiculturalité, en utilisant l'attractivité de la fonction, en mettant l'accent sur les avantages de travailler à Bruxelles, en améliorant nettement les conditions de travail, en dotant le personnel d’un matériel performant, en veillant au bien-être et à l'équilibre travail-vie privée et en mettant tout en œuvre afin de transformer l'organisation policière en un employeur réellement séduisant.
D’autre part, il faut trouver une adéquation entre la disponibilité des talents en région bruxelloise et la demande de collaborateurs compétents dans les services de police bruxellois. Compte tenu de la pénurie, il convient d'étudier la possibilité de collaborer avec des organisations qui préparent et mettent en relation les demandeurs d'emploi avec les services de police (dont WannaWork, School 19, Actiris, ...).
De plus, les services de police peuvent, moyennant des prises de contact et en organisant des activités avec les jeunes des écoles et autres, susciter leur intérêt pour une fonction future au sein de la police.
La formation de base (et continuée) constitue un levier essentiel d’amélioration. Elle réunit les collaborateurs des différents services de police, contribue au développement des compétences, au réseau des relations, au développement des équipes et à la coopération, mais surtout veille à ce que les collaborateurs réfléchissent dans et pour l'organisation et ne restent pas de simples exécutants. La formation assure ainsi un changement de mentalité. Nous estimons que tous les collaborateurs devraient consacrer chaque année au moins 5% de leur temps de travail à la formation. Outre les exigences de la maîtrise de la violence, les besoins de formation de la police bruxelloise (tant théoriques que pratiques) doivent être perfectionnés. A cet effet, une liste de thèmes adaptés aux services de police bruxellois de la capitale peut être établie. Les centres de connaissances (Centrex) de l'ANPA doivent être activés à cet effet.
De plus, une capitale nécessite également la connaissance de plusieurs langues : le néerlandais, le français, l'allemand, l'anglais et l'arabe exigent de l'attention, sans oublier l’espagnol ni l’italien.
Plus précisément, nous demandons à la police fédérale et aux zones de police de Bruxelles d'élaborer un plan sur mesure (à court, moyen et long terme) pour compléter les effectifs de la police locale et fédérale et qu'une intense collaboration soit mise en place entre la police fédérale, la police de Bruxelles et l’ERIP/GIP afin de développer des plans de compétences et de formations sérieux, basés sur des profils de fonction renouvelés.
3. Investir dans le travail de quartier – la police de proximité
Travailler dans une métropole multiculturelle est complexe et chaque quartier ou partie de quartier est unique. Favoriser la communication avec la population, notamment à Bruxelles, répondre aux besoins et attentes de chaque quartier et contribuer à l’habitabilité et à la sécurité des communautés demeurent un défi. Une police de proximité efficace est donc cruciale.
L'ancrage au niveau local du policier de quartier est une condition importante pour la confiance et son impact. Nous préconisons de maintenir la priorité à l'action de voisinage et à l’incitation au dialogue avec les différentes communautés. En effet, la figure du policier de quartier est cruciale, à la fois comme baromètre de son quartier et pour son rôle d'information, tant au bénéfice de la police que des services de renseignement, raison pour laquelle nous sollicitons que des efforts complémentaires soient faits en faveur des policiers de cet important dispositif.
Bien qu'il y ait eu de nombreuses initiatives innovantes et louables dans la région bruxelloise ces dernières années (Coffee with a cop, Partenariat Local de Prévention (PLP), ...), une incitation supplémentaire peut être tirée des initiatives nationales et internationales, de l'expertise et des bonnes pratiques afin d’être en contact rapproché avec les différents quartiers et les multiples partenaires, tout en accordant une attention aux caractéristiques et aux attentes locales. Les réseaux de connaissances (e.a. les Centrex) peuvent soutenir efficacement cette méthodologie.
4. Développer des partenariats
La police ne travaille pas en vase clos mais fait partie des nombreux acteurs du marché de la sécurité et de la qualité de vie. Travailler en équipe avec des partenaires publics et privés, sur la base de la plus grande valeur ajoutée de chacun, est devenu évident.
Il existe actuellement de nombreux forums, réseaux formels et informels, réunions diverses, auxquels la police participe. Certains réunissent les plus hauts dirigeants, d'autres les cadres de base ou cadres moyens. Certains sont généralistes, d'autres thématiques. Ils sont politiques ou opérationnels, utiles ou quelque peu répétitifs. Il est fortement recommandé que tous ces réseaux puissent être répertoriés de manière telle que leur expertise puisse être utilisée de manière optimale. De nombreux sujets pourraient faire l’objet d’une collaboration et d’un échange d’idées plus judicieux.
Ultérieurement, la nécessité d’une restructuration ou d’une rationalisation des réseaux et/ou un élargissement du contenu ou de la spécialisation pourront être examinées. Le service Bruxelles Prévention & Sécurité (BPS) pourrait jouer un rôle de médiation à cet égard.
5. Digitalisation
Digitalisation, technologie, matériel innovant, … chaque entité est à la recherche de solutions efficaces et efficientes. Nous soutenons totalement les investissements dans l'intelligence et les nouvelles méthodologies. Grâce à cela, le travail policier sera simplifié et son efficience augmentée.
Certains systèmes sont initiés et gérés par la police fédérale. D'autres sont la résultante de recherches propres ou de développements internes afin de disposer de solutions sur mesure. Si nous souhaitons que nos systèmes soient compatibles entre eux et fonctionnent de manière optimale, il conviendrait d'intervenir plus en amont et de manière concertée dans le processus.
Quand une zone souhaite développer ou acquérir un élément innovant, il est préalablement nécessaire qu'une concertation ait lieu. Nous suggérons que chaque entité qui souhaite opérer un investissement potentiellement intéressant pour d'autres entités ou ayant un impact sur le fonctionnement de la police intégrée, fasse préalablement part de ses intentions de telle manière qu'un projet de coopération puisse être lancé aussi tôt que possible. Il est essentiel de pouvoir investir en un matériel uniforme qui tienne compte d'une opérationnalité et d'une communicabilité réciproques.
Compte tenu du fait que la police fédérale souhaite, dans le cadre de ses nouveaux projets, mettre sur pied une procédure et/ou une plateforme, nous exprimons le désir qu'elle présente rapidement cette proposition de modification vers la police intégrée.
Pour les zones de police bruxelloises et pour les partenaires, BPS pourrait jouer un rôle de coordination.
Conclusion
C'est clair, on ne peut plus traîner. Pouvons-nous lancer un appel à tous les dirigeants afin de réellement relever les défis ? Peuvent-ils se rassembler, formuler des propositions et lancer des projets qui ont un impact significatif sur l'amélioration des opérations de police à Bruxelles à court et long terme ? La section du CPL de la Région de Bruxelles-Capitale souhaite contribuer à cet avenir et veut apporter sa pierre à l’édifice.
[1] Workshop dd 16/10/2018 à 5 thèmes : (1) Community Policing ; (2) Impact ICT ; (3) Missions primaires versus outsourcing ; (4) Spécialisation versus polyvalence ; (5) Sélection et recrutement.
[2] Points d’attention prioritaires dans la recherche d’une police moderne et visant l’excellence : (1) Une culture organisationnelle forte ; (2) Un employeur attrayant et fiable; (3) Un leadership de premier plan; (4) U : investir dans la gestion des talents et le management participatif ; (5) L’ancrage et la stimulation de l’innovation dans le fonctionnement de la police ; (6) Un cycle de politique et de gestion cohérent ; (7) Une gestion dynamique des ressources et des moyens financiers ; (8) Une gestion performante de l’information ; (9) Le contrôle de la sécurité au sein de la police ; (10) Une communication transparente et respectueuse.